Vers un découplage (temporaire) des politiques monétaires

La différence de situation économique devrait conduire à un certain découplage des politiques monétaires de part et d’autre de l’Atlantique.

  • #Etudes économiques
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  • Les progrès réalisés en matière de lutte contre l’inflation et une activité encore ralentie devraient amener la BCE à baisser ses taux directeurs dès le mois prochain. Aux Etats-Unis, la Fed devra se montrer plus patiente : l’inflation est trop élevée et ne baisse plus depuis plusieurs mois et la dynamique économique reste soutenue même si le marché du travail montre des signes de détente. Ces divergences renvoient à la nature de la poussée inflationniste : en Europe, elle a surtout découlé d’un choc d’offre (perturbations pendant la crise Covid et envolée des prix de l’énergie au début de la guerre en Ukraine). Aux Etats-Unis, les soutiens budgétaires puissants ont finalement constitué un choc de demande qui s’est révélé plus long à se résorber.
  • Le panorama mondial est également marqué par le particularisme de la Chine. Son industrie y semble florissante, avec un niveau de production dépassant de plus de 20 % celui qui était observé avant la crise sanitaire. Le contraste est saisissant avec les autres régions du monde où la production industrielle est poussive. Cela peut s’expliquer par plusieurs éléments. Une dynamique spectaculaire dans certains secteurs porteurs, comme l’automobile où la Chine est devenue leader du marché du véhicules électrique, en partie grâce au soutien public. Par ailleurs, l’inflation chinoise a été beaucoup plus faible qu’en Europe ou aux Etats-Unis ces derniers mois, en partie sous l’effet de prix de l’énergie plus faibles et d’un excès de capacités de production, ce qui a renforcé la compétitivité des entreprises chinoises.
  • Après des années de politique monétaire hyperaccommodante, la Banque du Japon semble avoir perdu la main pour gérer sa monnaie. Elle avait donné un signe fort en sortant son taux directeur du territoire négatif en mars. Mais elle s’est montrée plus hésitante fin avril, ce qui a été fatal pour le yen. Contre le dollar, il a ainsi approché 160 yens/$ fin avril, près de 60 % de plus que début 2021, avant que l’institution monétaire japonaise ne fasse sans doute baisser la pression par ses interventions sur le marché des changes.
  • La perspective d’une baisse plus tardive du taux directeur de la Fed a conduit à une nette remontée du taux des emprunts d’Etat américain à long terme (de l’ordre de 40 points de base en avril). Ce dernier restant directeur sur le marché obligataire mondial, les taux longs européens se sont aussi orientés à la hausse. Dans un contexte d’incertitudes géopolitiques très fortes (tensions directes entre Israël et l’Iran, pression de la Russie sur le front ukrainien), les emprunts d’Etat ont aussi joué leur rôle traditionnel de valeur refuge. La hausse des taux et l’incertitude a en revanche pesé sur les indices boursiers qui ont enregistré une correction après un début d’année tonitruant.

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